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Interview Oakley White-Allen

Si Jésus avait été un freerider, il aurait fort bien pu avoir un accent américain, avoir les cheveux en vrac, porter des bagues... en fait ressembler à Oakley White-Allen. 

article Freeride world tour

Oakley White-Allen, 33 ans, Américain, dont les initiales sont une exclamation (OWA !) a profondément été touché par la glisse. Il débarque sur le tard dans le monde chatoyant des skieurs médiatisés avec ses allures de prophète tranquille, de sage illuminé sur les bords : il skie avec des cristaux dans la poche, porte parfois des plumes d'oiseaux dans ses cheveux, ne rate pas une édition du festival Burning Man et skie comme en lévitation.

Il a la diction et le regard de ceux qui reviennent de loin - et y retournent souvent - une lenteur contemplative qui se met soudain à trotter quand son interlocuteur lui résiste. Chaque mot est important, chaque courbe a sa valeur (même s'il en est avare, comme lors de la dernière étape du Freeride World Tour à Verbier avec une ligne simplissime et puissante).  Il a ces accélérations de prose, ces questions qui sont autant de coups de sang rhétoriques ("oui mais pourquoi dis-tu cela ?"). Et puis sur la neige, tout n'est que fluidité et rapidité.

il ne s'encombre de rien, vise l'essentiel et s'en contente. Si Jésus avait été freerider, il aurait fort bien pu avoir cet accent américain, avoir les cheveux en vrac, porter des bagues... et ressembler à Oakley White-Allen. 


Documentaire de 13 min pour prendre le temps de découvrir ce skieur, lors de sa première participation à l'XTrem de Verbier, en avril dernier. 

-Racontes-nous d'où tu viens ? Où tu as skié pour la première fois ?

-J'ai grandi en Nouvelle-Angleterre (nord-est des Etats-Unis, ndlr), entre le Vermont et le Maine. J'ai commencé à skier dans le Vermont. Enfant, c'était surtout du ski de fond, ma famille ne pouvait pas payer le ski alpin, et j'y allais trois jours par hiver. Je pensais toute l'année à ces 3 jours. A 16 ans, j'ai pu faire du ski de compétition à l'école, géant et slalom. 

Trois choses m'attiraient dans le ski : la première était la nature, être dans la montagne, avec les oiseaux, les animaux, loin de la ville. La deuxième est la vitesse et l'excitation de voler sur la montagne et puis la troisième, c'était l'opportunité de passer du temps avec mon père.  

Ensuite, je devais entré dans une école d'art, j'avais pris des cours à Boston pendant l'été, j'étais très sérieux sur la question ! J'étais intéressé par le graphisme informatique, la photo, le dessin de natures mortes et de portrait. Mon portfolio a été volé. Dix ans de travail disparu. A l'époque, je commençais à plus aimer l'action du ski que le calme des studios d'art. Ce vol a été un signe : je devais quitter le monde de l'art. J'ai décidé de ne pas aller dans cette école, j'ai déménagé à Sugar Loaf, une petite montagne dans le Maine. J'ai eu un job de conducteur de navette la nuit. Je skiais le jour et travaillais la nuit. A 18 ans, en 1998, j'ai commencé ma vie de skieur.  

-Quelles ont été tes influences marquantes à l'époque ?

-La plupart de mes amis étaient snowboarders, je regardais beaucoup de films de snow et de skate avec eux. Il n'y avait qu'un petit nombre de skieurs qui avaient la même ouverture d'esprit que les snowbaorders : rider la montagne comme un surfer, ne pas être agressif comme un coureur. C'était une façon de rider la montagne qui me convenait. A cette époque l'équipement de ski n'était pas adapté pour skier de cette façon, alors on se construisait nos propres twin tips, avec de la vapeur pour tordre les talons.

L'année suivante, au Vermont, j'ai gagné un contest de pipe, le Kaluha Pipe Jam à Stowe Mountain, ce qui m'a incité à déménager à Whistler où j'ai eu un boulot dans les camps d'été sur le glacier. C'était vraiment mon début dans le ski. Je suis resté à Whistler sept ans, j'ai participé à des compétitions de park, de half pipe, de big air. Entre 2000 et 20004 j'ai eu de bons sponsors. J'ai rencontré des grands noms, ils ont été sympas, j'ai appris d'eux : PY Leblanc, Hugo Harrison, Mark Abma et plein d'autres. 

Interview Oakley White-Allen

Je n'étais pas habitué à la poudreuse : les jours ou la neige était dure, je skiais vraiment bien alors que dans la profonde je ne pouvais pas les rattraper. Il m'a fallu quelques années pour développer ma technique. A cette période-là, je skiais 200 jours par an, 235 pour mon record. 

Ma plus grande inspiration depuis le début, et maintenant encore, est Candide Thovex (et Terje pour le snowbaord). Pourquoi ? Pour sa grace, sa vision du terrain, il est très élégant en l'air, sur la neige, il ne se bat pas contre la gravité, contre la montagne, il travaille avec toutes ces forces. Il est capable de s'alléger entre les virages, dans les endroits critiques du terrain, partout où c'est nécessaire. C'est difficile de résumer le style de Candide, il faudrait tout un livre ! Ses mains. Regarde ses mains. Son utilisation des bâtons, c'est une une partie intégrante de son style, alors que la plupart des skieurs sont concentrés sur leurs pieds et leur corps. Candide est très conscient de ses mains, ce qui rend son ski différent. Il choisit également des rotations avec moins de degrés donc il est plus lent sur un même jump, il tient ses grabs plus longtemps, il est plus libre en l'air. Son cork 9 tail grab est absolument parfait.

-Tu te dis freeskier, comment peux-tu définir ce mot ?

-C'est une culture qui englobe tous les aspects de ma vie. Je ne suis pas un amateur devenu pro, je suis simplement un freeskier dans l'âme, to the core. Ce n'est pas quelque chose que je veux définir avec des mots, mais représenter avec ma vie. Ce serait comme essayer d'expliquer ce qui fait de quelqu'un un artiste.

-Tu t'es ensuite concentré sur le freeride ?

-Vers 2004/2005, j'ai perdu de l'intérêt pour la compétition de half-pipe et de slopestyle. Ce n'est pas ce que je voulais vraiment faire, c'était juste une opportunité de vivre et d'entrer dans le ski. J'ai décidé de me consacrer au freeride, mes sponsors de l'époque n'étaient pas intéressés, j'ai perdu mon statut d'athlète sponsorisé. J'ai recommencé à skier pour moi, comme je le faisais avant, pendant trois ans à Whistler. J'étais sans boulot, homeless, je dormais chez des potes pendant les nuits très froides, dans les parkings sinon, sous des escaliers. J'attendais le matin que le domaine ouvre, je me réchauffais au lodge, je skiais par toutes les conditions météos et ce fut ma plus grosse période de progression. J'ai augmenté ma connaissance de la montagne... mais la principale chose que ces années m'ont donné, c'est d'être à l'aise en montagne, de la connaitre, de rester calme, de baisser mon rythme cardiaque dans les endroits dangereux, je suis devenu moins peureux.

Ensuite, je suis revenu aux Etats-Unis, j'avais passé assez de temps dans la rue. Je n'étais plus un émigrant je pouvais donc travailler, je suis allé en Utah où je ne connaissais personne. Il n'y avait que moi et le ski. J'ai acheté un forfait pour Snowbird et Alta et pendant les deux années suivantes, j'ai skié et je me suis fait des amis. Entre 2007 et 2010, j'ai participé à un seul contest de freeride par hiver, uniquement pour le plaisir. J'aimais ça ! J'adorais la camaraderie entre les athlètes, je me sentais dans un vraie tribu. J'ai rencontré Sage (Cattabriga, ndlr) à Alta, il m'a invité à venir habiter avec lui. De 2009 à 2011, j'ai vécu avec lui. Je savais que j'avais un niveau de ski professionnel et la seule chose qui m'empêchait de trouver un sponsor était mon manque de présence dans le monde du ski : un contest par an ce n'était pas assez. 

-C'est pourtant par la compétition que tu vas changer de statut...

-Pas tout à fait... En 2010, j'ai fini 3ème au Freeskiing World Tour à Snowbird, et il m'a fallu encore deux ans pour que des marques s'intéressent à moi. Je ne sais pas pourquoi, mais en Amérique du Nord, les sponsors ne s'intéressent pas vraiment à ces évènements, ils suivent plus les magazines, les photos et les segments dans les vidéos. Finir 3ème n'a rien changé à ma situation, en revanche cela m'a donné un statut, un classement.

Aujourd'hui, je ne peux toujours pas m'appeler pro, personne ne me paie pour skier. J'ai des sponsors, un petit budget voyage, du matériel gratuit, je suis dans le top ten du Freeride World Tour, des photos dans les plus grands magazines, deux invitations à la Swatch Skiers Cup... mais je ne suis toujours pas un pro. Je vis comme un skibum normal : je travaille (en été sur des parcours de golf et en charpente, comme bootfitter ou skiman l'hiver). 

Interview Oakley White-Allen

J'ai eu pas mal d'event où j'ai envoyé le plus de cliffs possibles et j'ai eu de bons résultats. Mais ça n'intéresse pas plus les sponsors, ça n'améliore pas ma vie de gagner des compétitions, par contre ça améliore ma vie d'avoir du plaisir en skiant. Certains jours je peux faire des lignes très difficiles mais je ne vais jamais me forcer, parce que ça ne paie pas mon loyer, ça ne me propulsera pas dans le firmament des stars du ski... ce sera comme les étapes de Fieberbrunn ou de Courmayeur où je suis tombé et où j'aurais pu me faire très mal. Je skie un run de compétition comme si je tournais un film. Mon rêve est d'attirer l'attention de photographes et d'une boite de prod qui voudraient travailler avec moi. Oui, je dois travailler, payer ma sécu, mon téléphone portable, mon loyer, avoir du temps pour m'entrainer et rester en forme, voyager...  

-Tu es devenu critique du milieu de ski ?

-Quand mes sponsors m'ont quitté, j'étais devenu très cynique. J'ai évolué, je n'en veux pas à l'industrie de ne pas m'aider à vivre. C'est l'industrie qui choisi ceux qui vont monter, je ne prend pas personnellement le fait de n'avoir pas été choisi. Je suis là, j'y suis arrivé par moi même, je n'ai pas de team manager pour m'aider à venir sur le Freeride World Tour, je dois tout à moi-même. 

-Il y a une dimension spirituelle dans ton approche de la glisse. Tu peux nous en parler ?

-Je suis une personne spirituelle, j'ai une connexion avec les énergies naturelles. J'hésite à en parler, je préfère simplement décrire ma connexion avec la nature en terme de respiration, d'expansion et de contraction. C'est ma méditation. Intérieur et extérieur. Cela m'apaise dans les situations dangereuses. Quelques respirations conscientes peuvent éteindre ma peur. Tu peux l'expliquer basiquement par une augmentation de l'oxygénation, en réalité c'est un reflet de principes plus profonds. 

Une seule respiration consciente, peut éliminer toutes les distractions. C'est comme ça que je peux gérer le monde du ski. Chaque jour, je me garde un peu de temps pour deux pensées : je pense in quand j'inspire, je pense out quand j'expire. Ce n'est pas un mantra compliqué. C'est très simple. Quelques minutes par jour. Si je suis distrait par des pensées, je reviens à ce mantra. Ca m'aide beaucoup... 

Interview Oakley White-Allen

-Tu parles comme un surfer !

-Il y a une simplicité de la vie en surf : dormir sur la plage, prendre des fruits sur les arbres, pêcher des poissons, les vagues sont gratuites... Le ski est plus compliqué en général. Tu peux toujours construire une grotte dans la montagne et vivre comme un surfeur, mais en général l'équipement est bien plus cher, les endroits sont plus onéreux à vivre et ces aspects économiques ont des effets. Tout est plus compliqué, c'est une lutte. Ca peut être plus difficile de trouver une dimension spirituelle avec la montagne dans un cadre ski.

Je ne suis pas devenu surfeur parce que je voulais être un freeskier ! Je ne sais pas pourquoi, j'ai vu autant de films de surf que de ski étant gamin. Peut-être parce que tu vas plus vite en ski. Plus gros. Je ne sais pas si ce sont des raisons, c'est simplement ce qui me touchait en tant qu'enfant. 

-Tu skies avec des cristaux dans la poche...

-Ils viennent d'Autriche, c'est ma connexion avec les Alpes, des montagnes que je rêve de skier depuis que je tiens debout. Finalement, l'année dernière j'ai pu visiter les Alpes et ces cristaux sont un souvenir de l'énergie de ces pics. C'est aussi l'origine de l'alpinisme moderne, ses techniques ont été développées à Chamonix par des cristalliers. Etre en montagne, ce n'est pas seulement pour le ski, il y a beaucoup d'autres raisons d'être là-haut...

10 Commentaires

FloF C'est la nouvelle mode de glisser des remarques sur les stup dans les articles skipass ?
 

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Emil67 Le contre-modèle du pro skieur actuel, vraiment intéressante cette interview. Un type exceptionnel !
 

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Rider de Terre Sympathique interview. Peut être que le bonhomme plane trop pour savoir se vendre et faire ce qu'il faut pour en vivre ? Qui sait.

Par contre relisez les stagiaires, ça pique les yeux ;)

"je devais entré
Entre 2000 et 20004
Terje pour le snowbaord"
 

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