L'OR BLANC

Déjà 15 ans. 15 ans que j’ai quitté ma petite campagne Auvergnate pour les vastes domaines d’or blanc des Alpes.

L’Or Blanc était l’expression que mon frère aîné Tom donnait à la douce et légère poudre blanche que l’hiver avait la bonté de nous offrir.

Il aimait ça la peuf et dieu sait qu’il connaissait la montagne par cœur, un peu comme moi d’ailleurs.

Je me rappelle des sessions dans des conditions à faire pâlir la plupart des gens, pratiquant ou non l’alpinisme et autres sports extrêmes.

Je ne me considère pas comme un « rider » professionnel comme le grand Candide THOVEX ou autre Victor GALUCHOT, Fabien MAIERHOFER et tous le reste, mais, avec le recul, je me sens assez expérimenté pour vous raconter une histoire qui pourrait changer votre vision sur certains points.

Nous étions donc dans une petite vallée aux abords de la Suisse, un petit coin tranquille, à la maison comme on dit. Vous verriez cette immensité de neige sauvage, sans civilisation, sans remontée mécanique au loin, pas un câble, rien. Juste nous et notre gros kif général. Il faisait beau ce jour là ! Très beau même. Je me souviens que Tom voulait prendre tout son matériel pour filmer notre session. Il avait de tout, GoPro, drône, stabilisateur, tout pour faire un film à la « Bon appétit ski » ! On était comme des gamins, excités comme des fous à l’idée de se tirer la bourre et d’envoyer les plus gros tricks possibles !

On a toujours notre matériel de sécu avec nous : Sac ABS, ARVA, notre jolie pelle à jump, et tout ce qui va avec. Mais ce jour là, on était pas sur une vallée inconnue ; ça faisait déjà 5 fois qu'on passait par là depuis le début de la saison. On était à la maison. On avait envie de filmer et puis bon, on connaît les risques ; 15 ans de pratique, un lieu assez simple. Tom décida donc de laisser son ARVA mais de garder son sac ABS pour ranger un peu de son matériel. Par acquis de conscience, je décidais de garder l'ensemble de mon matériel de sécurité.

Cette fois-ci, au vu de la météo, nous avons décidé de commencer ce hors-piste en montant avec les peaux (ou l'hélico Bon'app pour les connaisseur) jusqu'à la cime afin de basculer sur le versant souhaité. 

Une fois en haut, nous avons été surpris, je me souviens, par la qualité de la neige encore si fraîche ! Un pur bonheur ! Les premiers virages tests passés, nous voilà en train de watter dans une neige ultra fine. On a filmé quelques boîtes assez comiques, j’imagine. C’est à la moitié de la descente qu’on a commencé à ralentir. Tom faisait parti des ambassadeurs d'une marque connue de ski et aimait le montrer ! On commença à avoir de bons spots pour filmer quelques tricks sympas.

Je me rappelle de l’air innocent mais taquin que mon frère avait dans sa voix et son attitude.

« - Prends en d'la graine petit ! » Me disait-il.

Un vrai comique celui-là !

Après quelques passages, Tom avait repéré un bon gros rocher qui lui donnerait un bon mute grab à filmer. Mais, têtu comme une mule, il voulait absolument que je le filme une première fois en le suivant avec le stab. On allait régaler nos followers à coup sûr !

Après avoir trouvé notre spot, je me mis derrière Tom en amont du rocher, pris son sac et sortis le stabilisateur. Tout était bon, exactement comme les tricks habituels, sauf que là, je filmais.

Après un court instant, il s’élança. Ce fut un saut monstrueux ! Le mute grab était parfait ! Mais quelle erreur nous avons faite... C'est une fois la réception de Tom effectuée que j'ai vu la plaque se décrocher. Pire qu'une plaque, c'était carrément la pente qui glissait. 

Ce jour là, j'avais mes dragonnes. On m'a dit cent fois de ne pas les mettre en hors-piste. J'aime pas perdre mes bâtons alors je les garde. A cause de ça, j'ai mis plus de 20 secondes à déclencher l'airbag pour qu'il se gonfle. Et ça, ce n'est pas cool !

On fut tous les deux emportés par la plaque, et ce fut un moment horrible. J'ai déclenché mon système ABS tout de suite, ce qui m'a permis de rester en surface. Je soufflais, fort. Au moment où j’ai repris un peu mes esprits, dans un laps de temps relativement court, je me mis à crier le nom de Tom. Me débattant pour sortir de cette neige, je m’aperçus alors que le sac avec lequel j’étais resté à la surface n’étais pas le miens. Allez savoir comment, mais celui que j’ai déclenché, c’était celui de Tom. Ce qui voulait dire une chose, mon frère était quelque part, dans l’avalanche, sans sac ABS, et sans Arva.

Mon expérience me fit réagir vite. J'ai mis mon ARVA en position par espoir qu'il ait décidé à la dernière minute de le prendre. Rien. J'ai tout de suite sorti mon téléphone pour appeler les secours. 

Dans une vallée.. sans rien autour.. il m’a fallu 3 minutes pour contacter les secours, 10 pour apercevoir l’hélicoptère et 2 minutes pour la mise en place .

Voilà 15 minutes que Tom est enseveli. On estime la probabilité de survie d’une personne ensevelie par une avalanche ayant un minimum de chance à 20% après 15 a 20 minutes enseveli.

Après de longs instants, le chien de l’équipe cynophile eut une piste, la suivit, se mis à hurler et à gratter le sol. Tous ont accouru sur les lieux pour déneiger, et en quelques secondes, j’aperçu le gant de Tom. Quelques minutes après, il fut transporté par hélicoptère en Arrêt Cardio Respiratoire. A 34 ans, mon frère Tom décéda des suites de ses blessures à l’hôpital. Les médecins n’ont pas réussi à le réanimer.

Voilà comment une simple sortie détente et éclate, peu se transformer en cauchemar.

Moi c'est Lucas, j'ai 23 ans et suis originaire d'une petite ville proche de Clermont Ferrand. Si je vous raconte ça aujourd’hui, c’est pour éviter que cela se reproduise. Car, même en connaissant les lieux par cœur, et avec de l'expérience, cela ne nous a pas empêché de faire des erreurs.. Comme sauter à deux dans la pente sans avoir contrôlé, et mettre des dragonnes. Aujourd'hui, Tom ne peut pas parler de son histoire et depuis, je me sens responsable de cet accident. Il aurait eu son sac, son Arva, il aurait sûrement survécu au même titre que moi et nous serions rentrés, flippés et avec une bonne leçon, mais en vie.

Se pensant plus fort que les autres, croyants que parce qu’on est chez nous, il ne peut rien nous arriver, est une grave erreur que vous devez corriger. Maintenant.

Ne mettez pas votre vie et celles de vos proches en danger inutilement.

Un ARVA, un sac ABS,une pelle et une sonde coûtent 500€. Combien valent vos vies d’après vous ? Pour moi, celle de mon frère n’en avait pas, car la vie n’a pas de prix.

Donc si vous sortez des sentiers, même à domicile, équipez vous et restez en sécurité.

Moi c'est Lucas, j'ai 23 ans. Je viens de Clermont Ferrand dans le Puy de Dôme.

 J'ai glissé sur mes premières lattes à l'âge de 3 ans. Ce fût bien évidemment un coup de foudre et la neige est vite devenue mon premier amour. Depuis, tous les ans je m'entraine sur le parc et les Hors-Piste de Val-Thorens et alentours. Depuis 5 ans maintenant, je pousse toujours plus loin avec ma petite paire de peaux ! Dieu sait qu'elles sont utiles cette année ! Pour le matos, je m'équipe bien évidemment chez Glisshop ! J'ai la chance d'habiter à côté du magasin ! (désolé pour les autres mais vous avez toujours le site GLISSHOP.COM !)

Vous pouvez me suivre sur mes comptes Insta : aoj_studio (https://www.instagram.com/aoj_studio/), lucacce34 (https://www.instagram.com/lucacce34/), ainsi que sur ma chaîne YouTube : AOJ Studio (https://www.youtube.com/channel/UCsDnGdmvMf4G4y_tU3-YwdQ), toute récente qui n'attend que ses premières vidéos ski !