Test Faction Dictator 4.0 2019

4 tests Faction Dictator 4.0.

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Note moyenne : 8/10
skiato

Un scalpel de caractère, raide et puissant

Faction Dictator 4.0
Avis sélectionné
Profil du testeur : 30 ans | 1,85m | 82kg | Expert | Pantin
Taille testée : 192
Conditions du test : Tout ce que la montagne peut proposer en une saison : de la profonde légère et lourde, de la trafolle, des bosses, du carrelage, et de la bonne soupe de printemps... Et ce que ce soit sous le soleil, la neige, le vent, la pluie ou le brouillard
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Test Privé : Faction Dictator 4.0

Points forts

Puissance, stabilité, relance, capacité à couper, capacité à déjauger... Un ski au caractère bien trempé qui fait progresser

Points faibles

Cruel manque d'amorti dans le relief

C'est l'histoire d'un test privé...

Petite mise en situation : nous sommes en octobre 2018. La saison de ski n'a pas encore commencé et déjà, tout le monde ronge son frein. Sur le forum de Skipass - et en particulier dans un certain rade peuplé selon la légende de grincheux à la pilosité fournie - la fébrilité est palpable. Ca s'invective à droite ("nan mais ce niveau de pasprêtitude..."), ça chine à gauche ("Je suis à la recherche d'un Scrapper 3,14159265"), ça trolle au centre (*photo de G3 targa Ascent à la moindre mention du mot fixation*) et ça pinaille tous azimuts ("Puisque je te dis qu'un ressort horizontal ça fonctionne mieux qu'un ressort vertical!!!"). Bref, la vie suit son cours et chacun tente de s'occuper au mieux en attendant l'arrivée des premiers flocons.

En ce qui me concerne, cette période est pour moi synonyme de mercato. Je me suis fixé comme objectif d'augmenter mon niveau de ski en passant sur des paires plus exigeantes : je veux du performant quitte à me faire punir en cas de défaut technique. Autant dire que niveau Killapower, je fais n'importe quoi : et vas-y que je te rentre du DP Pro, et voilà que je me trouve une paire de H112 198, et tiens donc que je dégote un Titan Pro... Mon quiver grandit à vue d'oeil, tout comme le regard de dépit que m'envoie ma copine à chacune de mes nouvelles acquisitions.

Pourtant, en dépit de l'inflation galopante de mon nombre de paires de skis, je sens qu'il me manque encore quelque chose. Niveau fat, j'ai bien une paire de Bentchetler 192, mais je sens qu'elle ne correspond plus à mes attentes. Je cherche un truc qui me botte le c*l quand je suis mal placé, un engin qui me fume les cuisses si je ne tiens pas compte de son mode d'emploi, un fat musclé qui permette de charger comme il se doit les jours de neige sans fond mais qui ne rechigne pas lors des passages en neige dure. Une paire lourde, large, un peu à l'ancienne, qui se dompte à coups d'appui languette et de speed, qui demande à être dominée pour être exploitée. Bref, une paire de caractère, une paire en mesure d'apprendre à son possesseur de mieux skier.

Et là, miracle, Skipass et Faction ont l'excellente idée de lancer un Test Privé du Dictator 4.0, le gros fat à l'ancienne la marque helvétique, et y compris dans sa taille adulte de 192cm. Le descriptif et le nom on ne peut plus équivoque du ski me font penser que cette paire pourrait coller au cahier des charges que je me suis fixé. Ni d'une, ni de deux, je décide de postuler... Quelques jours plus tard, le verdict tombe : je fais partie des heureux sélectionnés ! Je me hâte de remercier Skipass et Faction pour cette belle surprise et me promet de malmener cette paire autant que possible, en la sortant quelles que soient les conditions, afin d'aboutir à un compte-rendu aussi complet que possible.

Les quelques lignes qui vont suivre cette (trop) longue intro sont donc le fruit d'une saison complète de test de cette paire, y compris dans des conditions qui ne sont pas faites pour ce ski. Pour ceux qui s'intéressent au sujet de plus près, je vous invite à vous rendre sur le topic de forum que j'ai ouvert autour du test, où l'on peut retrouver mes ressentis ainsi que celui de mon co-testeur - thom17 - au fur et à mesure de la saison. Pour les autres, les paragraphes qui vont suivre vont permettre de vous donner un aperçu du potentiel spoiler: monstrueux de ce ski.


Mais au fait, ça ressemble à quoi un Dictator, Jamie?

Fast forward jusqu'en en janvier 2019. Le père Noël est passé avec un peu de retard, et on me livre le fameux sésame au milieu du mois - non sans avoir eu à m'acquitter des quelques 120€ de frais de douanes nécessaires pour récupérer le colis #pasdebol. Aurais-je préféré le recevoir plus tôt ? Pour la bonheur des yeux, peut-être, mais honnêtement, il n'y avait de toute manière pas de quoi sortir les fats avant et le début de saison sur le carrelage a permis de se refaire les cuisses et de réviser sa technique et son mental dans les meilleures conditions qui soient.

Et sincèrement, au déballage du paquet, je me rends compte que ce mois et demi de préparation physique / technique / mentale ne sera probablement pas de trop pour dompter ces machines de guerre.

Alors que Faction a davantage construit sa réputation sur le côté newschool et joueur de ses skis et de ses athlètes, le Dictator 4.0 fait figure de père austère de la famille. Son shape et son outline sont à l'antipode des standards actuels des fats à double rocker mous : s'éloignant résolument de l'image fun de Faction (coucou le CT 4.0), le Dictator n'est pas sans rappeler certains de ces illustres ancêtres (coucou le Dictator de Salomon) ou plus simplement certains confrères issus du sérieux sérail autrichien (coucou le Bodacious). Résultat, on est sur un ski qui sent le sérieux, qui transpire la puissance et qui veut se classer dans le catégorie des armes. Jugez plutôt :

  • Lignes de cotes tendues : 139 - 115 - 127 avec un talon plat
  • Double rayon : 22 - 27 m
  • Cambre sous le pied - rockers bas, progressifs et très contenus en spatule (une trentaine de cms) et en talon (une vingtaine de cms)
  • Taper en spatule minimaliste et très raisonnable en talon
  • Titanal inside
  • Une semelle P-tex 3000 structurée qui glisse et résiste bien aux requins
  • Un poids nu de 5kg et des brouettes la paire en 192
Le flex du ski mérite un paragraphe à part entière tant il détonne par rapport à la norme "nouille trop cuite" actuelle. En deux mots, c'est MONSTRE RAIDE. C'est rigide en spatule, béton au patin, et très rigide en talon. En comparant aux autres paires que j'avais sous la main, ce Dictator 4.0 n'a rien à envier aux flex pourtant déjà considérés comme rigides de paires portant bien moins larges, comme le H112 QZ ou du DP Pro. Dans mon quiver, seul le Titan Pro lui vole la vedette.

Bref, seul la couleur jaune flashy du ski révèle ses originies, et ce petit tour du propriétaire laisse d'ores et déjà entrevoir le programme du vaisseau amiral de Faction en matière de freeride : il va falloir aller vite et faire chauffer les cuissots pour dompter ce ski qui semble bien né, sans quoi, ça risque d'être la punition.

Mais tout ça, ce n'est que la théorie. Il reste donc encore à confronter ces intuitions à la réalité du terrain. Et autant vous dire qu'en 4 mois, j'ai pris un malin plaisir à en faire voir des vertes et des pas mûrs à ce ski qui n'est peut-être finalement pas aussi brutal que son shape le laisse deviner...


Le Dictator 4.0, un ski pour parcourir et conquérir la montagne sous toutes ses conditions ?

Une première sortie qui me laisse perplexe ou "petit traité sur l'importance de pinailler sur le point de montage d'un ski"

Ne nous mentons pas, ma première sortie Dictators au pieds m'a au début laissé quelque peu dubitatif. 

Sur piste d'abord, sur une neige dure voire gelée par endroits, j'ai découvert un ski d'une rare rigueur sur la carre, avec une accroche de sangsue et capable de couper comme peu dans sa catégorie. La relance du talon en sortie de virage est grisante, mais le passage du coupé au glissé est pour sa part violent : le talon accroche et broute. 

Par ailleurs, j'ai eu du mal à trouver mon équilibre sur ce ski à double rayon : en appui languette, on reste sur le rayon court du ski et il faut franchement se redresser pour profiter du rayon plus long... Affectionnant l'appui languette, je trouve ce mode d'emploi pas hyper adapté à ma manière de skier mais aussi à la puissance que ce ski demande de déployer.

De même, en trafolle et profonde, le montage relativement avancé du ski demande de ne pas trop charger la spatule, sous peine de passer sous la couche de neige et de finir en tête-pied d'anthologie. Pour un ski qui se veut être un chargeur, je trouve ça assez antinomique.

Sentant que les problèmes rencontrés au-dessus pourraient probablement être liés à une inadéquation entre mon style de ski un peu à l'ancienne et le montage assez newschool du ski, je décide donc de reculer le montage d'un bon cm et demi par rapport au recommandé...

Et là, c'est la révélation.

Un ski qui se transcende une fois monté à -1,5cm du recommandé

Une fois le point de montage rectifié, j'ai découvert un ski radicalement différent, toujours puissant mais beaucoup plus fin dans sa conduite, et avec une capacité à accélérer en poudre dans la fourchette haute de ce qui se fait aujourd'hui. Bien sûr, cela vaut pour mon style de ski assez old school (j'appuie sur les languettes, et j'aime conduire le ski en chargeant la spatule et en déroulant sur l'ensemble de la longeur de la carre).

Sur piste d'abord, la reculade du montage fait certes légèrement perdre en relance en fin de courbe, mais on y gagne sur tous les autres plans. L'accroche reste irréprochable, et en prenant de l'angle, on parvient à couper de manière extrêmement propre sur les neiges les plus dures grâce à la phénoménale rigidité en torsion de la bête. La passage d'une conduite coupée à glissée est également bien plus fluide, le talon perdant sa fâcheuse habitude à brouter dans cette configuration. Le ski se révèle ainsi extrêmement sain sur neige damée, et on peut l'emmener autant en grandes courbes façon géant qu'en petite godille glissée pour se faufiler sur les pistes surchargées de retour station. Le double rayon se gère également beaucoup plus sereinement avec ce montage, avec un mode d'emploi qui devient bien plus intuitif : tu veux couper sur un large rayon ? Appuies sur les languettes. Tu veux raccourcir le rayon ? Appuies encore plus fort. Simple - efficace.

En neige profonde, froide et légère comme lourde, le Dictator est clairement dans son élément. Une fois le point de montage reculé, on découvre un ski particulièrement stable, qui ne replonge pas sous la surface, et qui permet d'enchainer les grandes courbes et les sauts de barre comme pas deux. Attention cependant, c'est un ski qui ne déjauge pas à l'arrêt et qui demande d'atteindre une certaine vitesse palier pour sortir don nez et être exploité. Aussi, les passages étriqués et les forêts quelque peu denses demandent d'être un peu connecté du bulbe pour pouvoir y emmener ces skis sereinement : il faut aller vite et ne pas hésiter à beaucoup jouer sur son jeu vertical pour raccourcir le rayon. Mais honnêtement, dans ces conditions, le ski m'a donné une banane rare, avec une mention spéciale pour les grandes combes qu'on n'hésite pas à avaler en 3 courbes, et en se prenant pour qui l'on n'est pas.

En trafolle légère, le ski garde son tempérament de bulldozer raffiné : on ne sent pas les paquets et on se retrouve rapidement à skier de la même manière que si l'on était sur un tapis de neige immaculée. En neige de printemps, on a littéralement le sentiment de couper sur une piste tellement c'est doux et agréable.

Alors, ce Dictator 4.0 est-il le ski ultime ?

Non, car là où le bas blesse, c'est lorsque le terrain se dégrade, que la trafolle commence à geler et que le relief se creuse. Là, la rigidité longitudinale du ski en fait l'un des pires compagnons qui soit : chaque relief planqué sous la couche de neige vous fait vous envoler, toutes les variations du terrain sont directement répercutées dans vos genoux et dans votre dos. En une phrase comme en 100 : le Dictator manque cruellement d'amorti, et propose à son skieur un feedback "franc" qui ne serait pas sa rappeler le fameux Titan Pro, mais avec une largeur au patin qui le rend encore plus inconfortable pour les genoux. Ca reste donc bougrement efficace, mais la notion de confort a clairement été oubliée du cahier des charges.


Conclusion

Le Dictator 4.0 est un des rares ovnis dans le paysage actuel des fats. Long, rigide, exigeant, c'est un ski qui se laisse davantage dompter à force de technique et de vitesse que de force brute. Tenter de le forcer le rendra rapidement épuisant, alors qu'en skiant proprement et en acceptant une prise de vitesse certaine, on découvre un ski à la fois puissant, maniable et stable. Certes, son manque d'amorti le rend particulièrement inconfortable en terrain dégradé, mais peut-on seulement en demander autant à un ski de 115mm au patin.
Au final, je vois dans le Dictator l'un des héritiers d'une époque quasiment révolue, où les skis de freeride étaient certes moins accessibles qu'aujourd'hui, mais offraient davantage de sensations et apprenaient surtout à skier mieux.
Après une saison sur le Dictator, je peux vous dire que ma technique s'est affinée. Et en dépit de ses quelques défauts, il a ce que la plupart des skis fats d'aujourd'hui n'ont pas : un véritable caractère qui le rend certes moins polyvalent mais aussi bougrement attachant.

#A RESERVER AUX NEIGES LISSES


PS : je dois également signaler que la plaque titanal supérieur de mon Dictator a commencé à se délaminer au bout d'un mois. Un cas désagréable, certes, mais qui semble être isolé vu que je n'ai découvert aucun autre cas similaire dont se sont plaints d'autres propriétaires de ce ski.

Le SAV de Faction a par ailleurs été d'un rare professionalisme, et a proposé de me remplacer le ski très rapidement et sans avoir à renvoyer la paire initiale, une fois la preuve du défaut apportée. Sur ce point, chapeau bas !

Pour qui ?

Skieur technique plus que bourrin, avec des cuissots suffisamment solides pour tordre l'engin

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