Le bâton de ski, parent pauvre de l'équipement ? Avouons qu'il a fait l'objet d'évolutions assez modestes au cours de l'histoire du ski, ce qui signifie aussi qu'il ne vieillit pas ! C'est d'ailleurs l'élément le plus ancien de ma panoplie : ils ne sont pas en bois, mais les dragonnes sont en cuir. Petit aperçu du bâton d'hier et d'aujourd'hui.

Déjà parus :
Historique
Le ski 1 et 2
La fixation
La chaussure

 

Dès les débuts du ski, les skieurs utilisent un grand bâton d’environ 2 mètres de long. Il sert surtout à se propulser en avant sur les terrains plats. Pour sa fabrication, les bois présents localement sont choisis, les qualités exigées étant la rectitude et la solidité. Il est parfois équipé, à son extrémité inférieure, d’une rondelle  qui l’empêche de s’enfoncer trop profondément dans la neige. Plus tard, quand les skieurs commencent à affronter des descentes, ils l’utilisent comme un balancier, tenu perpendiculairement au sol. Ils en font également un élément de freinage en le laissant traîner dans la neige profonde. Au début du XXe siècle, la perche unique est remplacée par une paire de bâtons plus courts, en noisetier ou en châtaigner. Leur hauteur est variable, comprise entre les aisselles et la taille de l’usager. La rondelle se généralise, elle consiste en un large cercle de métal léger lié à la pointe du bâton par des lanières de cuir. Contrairement aux autres éléments de l’équipement de ski alpin, on remarque que les bâtons ont très peu évolué depuis un siècle. Les principales innovations concernent les matériaux employés. Leur importance ne doit pas pour autant être négligée, puisqu’ils favorisent une bonne position du skieur.


1. La poignée

Les premiers bâtons étaient coiffés d’une gaine de cuir qui favorisait une meilleure prise en main que le bois nu. Les progrès de la plasturgie ont, dans une large mesure, profité à la qualité des bâtons. Une des applications principales des plastiques dans le domaine des bâtons de ski est la création des poignées ergonomiques. En s’adaptant à l’anatomie de la main, en particulier par une garde l’empêchant de glisser vers le bas, elles réduisent fortement l’effort musculaire nécessaire à la préhension. Autre innovation, les plastiques durs, peu confortables, laissent place (sur les bâtons haut de gamme du moins) à des matériaux dont la densité varie selon leur emplacement. Les matières souples, absorbant les vibrations, sont privilégiées au niveau de la paume pour le confort, et les plastiques durs se trouvent aux points de pression des doigts pour garantir la précision des gestes. Enfin, l’axe de la poignée est parfois légèrement décalé par rapport à l’alignement du tube pour donner au poignet une position plus naturelle, moins « cassée ».


2. La dragonne

Très vite, on fixe en haut de la poignée une sangle passant autour du poignet. Cette dragonne, en cuir et non réglable, permet de lâcher le bâton sans le perdre dans la neige. Elle est donc particulièrement nécessaire lors des chutes en neige profonde. Bien utilisée, la dragonne, en passant sous la paume, constitue un point d’appui important qui soulage la main d’une partie de l’effort musculaire. Aujourd’hui, elle est réalisée en matières textiles synthétiques, par exemple en polyamide, plus solide et résistant aux très basses températures. Elle peut être adaptée à la forme du dos de la main et doublée de néoprène pour lui éviter de glisser. Une simple boucle est prévue pour le serrage. Certaines dragonnes de sécurité sont prévues pour s’ouvrir en cas de tension brusque vers le haut. Le skieur exerçant généralement une pression vers le bas, ce système se déclenche dans tous les cas où le bâton, accroché accidentellement à un obstacle du terrain (branche d’arbre, pylône…), pourrait faire subir au poignet une contrainte dangereuse, capable de provoquer une entorse ou une fracture.


3. Le tube

La partie essentielle du bâton est le tube, qui supporte tous les appuis du skieur. Après les essences locales, telles que les résineux, le noisetier ou le châtaigner, appréciés pour leur rectitude, les fabricants se tournent vers le bambou, très résistant et légèrement souple, puis l’acier est largement employé. Cependant, son poids reste un inconvénient, compensé par sa robustesse. Dans les années 1940, il est remplacé par des alliages légers. Aujourd’hui, l’aluminium est largement employé car il est à la fois léger et résistant. Il est concurrencé par les matériaux composites, qui présentent un certain avantage mécanique : ils possèdent de bonnes qualités dynamiques grâce auxquelles les bâtons reviennent à leur position initiale après une déformation, si leur point de rupture n’a pas été atteint. Outre la nécessité de le remplacer, un bâton qui se casse présente un danger pour le skieur ; sa solidité ne doit donc pas être négligée. Les composites qui entrent dans la fabrication sont les fibres de verre, de carbone, de titane… Pour favoriser l’aérodynamisme et l’équilibre du bâton, le tube n’est pas parfaitement cylindrique, mais il s’amincit progressivement de la moitié de sa hauteur jusqu’à la pointe. Selon la discipline à laquelle il est destiné, il peut différer par quelques caractéristiques mineures. Les bâtons de freeride sont particulièrement longs pour procurer un appui suffisamment haut quand ils sont plantés en aval du skieur sur une pente raide et, de surcroît, couverte de neige profonde ; certains sont télescopiques. Les amateurs de freestyle apprécient la légèreté d’un bâton qui n’entrave pas leurs évolutions aériennes. Les coureurs de descente, de slalom, de slalom géant utilisent des bâtons profilés, à tube ergonomique, qui les autorise à les tenir très près du corps en position de recherche de vitesse.


4. La rondelle

Pour supporter les appuis du skieur sans trop s’enfoncer dans la neige, le bâton est équipé d’une rondelle. Placée à l’extrémité inférieure, quelques centimètres avant la pointe, elle est d’abord faite d’un disque de bois, assez fragile. On la remplace par un cercle de métal léger ou d’osier fixé au bâton par des sangles de cuir. À l’heure actuelle, les matières plastiques sont présentes sur toutes les rondelles. Leur forme et leur taille varient en fonction du type de neige pour lequel elles sont prévues. Une rondelle large, à partir de 80 mm de diamètre, procure une bonne surface de portance, nécessaire pour évoluer en neige profonde ; à contraire, la rondelle de course aérodynamique se présente sous la forme d’un cornet étroit, lui permettant de glisser le long des piquets de slalom sans s’y accrocher.

 


5. La pointe

L’extrémité inférieure du bâton est nécessairement effilée pour avoir la capacité de se planter même dans les neiges dures. En réalité, la pointe est munie de petites dents garantissant une bonne accroche sur la glace, quand le bâton ne peut pas se planter. Les skieurs utilisant généralement le bâton pour s’équilibrer lorsqu’ils marchent sur une route goudronnée, la pointe doit être très résistante à l’abrasion. Dans ce but, on peut y intégrer de l’acier sans alourdir inconsidérément le bâton, étant donné le faible volume représenté par la pointe.