Comment un Almanach Boiteux est à l'origine d'un trip ski exceptionnel

22h30, Novembre 2009, Lausanne... 

De retour de la première sortie de la saison.

Saturax ouvre une énième bouteille de Fendant...

« Ca fait plaisir de remettre les lattes, espérons que la saison soit bonne cette année... »

« Hum, l'Almanach du Messager Boiteux prévoit un début de saison sans neige, faut toujours croire les anciens... ».

L'assemblée se tourne vers Yannoche. Il a passé son enfance sur les pentes de Verbier alors malgré son jeune âge, il est écouté. Les visages se ferment...

« Merde... fait c... » Le tire-bouchon encore dans les mains, Saturax reprend « En 2007 c'était pareil. Du coup en février je me suis cassé au Canada pour faire de l'héliski à Whistler... » (Voir http://www.skipass.com/blogs/saturax/whistler-2.html )

Les yeux se lèvent, un ange passe, quelques verres se vident cul-sec....

« Pas les moyens... » lâche une voix.

« Y'aurait bien une solution... » propose une autre... 

Voilà comment grâce à un Almanach aux prévisions boiteuses, l'idée d'un trip « catskiing » à Red Mountain a surgit de quelques esprits embrumés.

Quelques heures passées sur internet à rechercher les vols, l'hébergement et surtout un « catskiing operator » et voilà le topo posé sur une feuille de tableur. Certes le verdict est sévère (4350 Francs suisses tout compris), mais 7 jours de poudreuse garantie alors que les prévisions de neige sur les Alpes sont plutôt « sèches », c'est suffisant pour décider les deux les plus en manque à casser leur tirelire.

7h00, le 14 janvier 2010, Lutry

C'est en pataugeant dans 20cm de fraiche tombée dans la nuit que Saturax traine son Dakine à roulettes et ses fats sur le port de Lutry (370m d'altitude !). Il a une pensée pour l'Almanach de Yannoche...

Nadir attend à l'abri CFF de la gare. « J'espère au moins qu'il y aura autant de neige dans les Monashees que sur le Salève... », rires un peu forcés...

11h14, 15 janvier 2010, Calgary

En plein jet-lag, l'annonce de l'annulation du vol Calgary – Castlegar provoque un torrent de paroles...

 « Merde... Fait c... » « Tu l'as déjà dit il y a 3 mois, et tu vois ou ça nous mène... ».

« Y a plus qu'à louer une caisse et se taper 9h de route à travers les Kootenays... »

L'employé de « Rent-a-Car » précise que l'aéroport de Castlegar est surnommé « Cancelgar », voire « Hasslegar » tellement les annulations de vols sont nombreuses, la faute à une météo capricieuse et au manque de guidage électronique... Bien, ben en voilà deux qui se rappelleront qu'il vaut mieux voler sur Kelowna et louer une voiture pour la semaine plutôt que d'espérer une éclaircie sur Castlegar !

Si la location sur 24h d'une voiture revient à 150 dollars canadiens (pour un aller simple – avec remise de la voiture dans une province différente et négociation serrée), la semaine avec remise au lieu de départ revient à 350 dollars... avec l'avantage de disposer d'une voiture sur place.

Quant à compter sur les transports en commun... faudrait pas oublier que c'est encore un peu le far-west ici !

21h30, 15 janvier 2010, Rossland, BC

Le premier stop dépose nos héros fatigués dans un des deux « Liquor shop » de Rossland. Si l'alcool n'est en vente que dans les magasins spécialisés et réservés aux adultes, ceux-ci ont la bonne idée de rester ouverts tard... Une bouteille de rhum est donc rapidement échangée contre quelques billets à effigie de sa majesté la reine d'Angleterre (le Canada fait parti du Common Wealth).

Les Liquor Shops ne vendant exclusivement que des boissons alcoolisées, un détour par le super marché local est nécessaire pour se fournir en adjuvant indispensable à l'élaboration du Cuba Libre, breuvage ni suisse ni canadien mais très apprécié néanmoins.

22h30, 15 janvier 2010, Red Mountain, BC

Dodo...

Big Red Cats propose une solution simple et peu coûteuse pour se loger : Le Red Shutter Inn. C'est de là que partent les bus le matin pour rejoindre les cats. Il en coûte environ 95 dollars par nuit.






7h30, 16 janvier 2010, Red Moutain, BC

Le petit dèj' du Red Shutter Inn est.... canadien ! Pancakes, bacon, sirop de sucre parfumé à l'érable – le vrai sirop d'érable étant hors de prix - , tout y est.

La société Big Red Cats, tenue par Paula et Kerin Gaul, fait bien les choses et sait accueillir ses clients.

 Après une parenthèse légale (signature des décharges dans lesquelles il est bien précisé que skier peut être mortel qu'en aucun cas la société organisatrice ne saurait être tenue responsable de quoi que ce soit, du simple rhume à la tétraplégie), les membres du groupe « Advanced skiers » grimpent dans le bus à destination de Red Shelter, le départ des Cats – des dameuses équipées e cabines pouvant transporter jusqu'à douze passagers.

Lors de la réservation de leur séjour, nos deux amis furent confrontés à un difficile dilemne... Étaient-ils « intermediate », « advanced » ou « experts » ? Afin de tenter d'avoir des groupes de niveaux équivalents, ce choix doit être fait dès la réservation. Modestes, les inscriptions furent faites sur la base de « advanced / expert » afin de ne pas trop se mouiller. A la pratique, il s'avère que si vous savez raisonnablement skier hors piste en toutes neiges, vous être clairement « expert ». Mais heureusement, Paula est cool et s'arrange assez facilement de changements dans l'organisation et le remplissage de ses « cats ». Un changement après une première journée agréable mais un peu trop « plate » est donc vite négocié.

17, 18, 19, 20, 21, 22 janvier, quelque part dans les Monashees

Le principe du catskiing est simple: On monte en dameuse, on descend en ski. Et ceci non-stop de 10h00 à 15h30. Chaque descente ou « run » fait en moyenne 350m de dénivelé (de 150 à 500m). C'est court comparé aux descentes que l'on peut faire dans les Alpes, mais le terrain est totalement différent.

Première chose, il faut aimer le ski en forêt, voire en forêt dense par endroits. Tout le terrain skiable est situé sous la limite de la forêt ce qui présente plusieurs avantages : Tout d'abord, la météo étant souvent à la neige, la visibilité reste toujours bonne. De plus le risque d'avalanche est plus faible que sur de grandes combes ouvertes. Enfin les arbres protégeant efficacement la neige du vent et des rares moment ensoleillés, celle-ci reste longtemps poudreuse et légère même après 3 ou 4 jours sans nouvelle chute.

Lors du voyage de nos deux skipasseurs, une vague de chaleur inattendue a balayé la Colombie Britannique avec des moyennes de -2 à -5 degrés ce qui est exceptionnellement chaud pour la saison. La neige habituellement froide et très légère était donc plus consistante que d'habitude et ressemblait plus à celle des chaines côtières du coté de Whistler, que Saturax, ce sacré petit veinard, avait pu tâter quelques années auparavant ;-)

Skier en forêt nécessite quand même quelques attentions particulières. La principale consistant à ne pas tomber dans un « tree well », ces espaces vides de neige que l'on trouve au pied des sapins. Compte tenu des quantités de neige, ces trous peuvent avoir plus de trois mètres de profondeur. Ces pièges peuvent être mortels pour un skieur ou snowboarder isolé. Skier avec un « buddy », un pote, est donc une question de survie.

L'autre problème de la forêt des Monashees est qu'il est extrêmement facile de se perdre. Les dénivelés restant faibles et les montagnes (hum... les collines...) se ressemblant toutes, avec des arbres et de la neige dessus, les points de repères sont quasi inexistants. Une erreur d'une centaine de mètres écarte le skieur inattentif du groupe et le retrouver n'est pas forcément simple.

Les guides (un en tête et l'autre en queue de groupe) sont très concernés par la sécurité, et pratiquent une pédagogie efficace qui évite la plupart des écueils.

Mackie west, Deep Throat, The Burn, The freeze...

La poésie de la toponymie n'a d'égale que la beauté et la diversité de ces runs. Steve Shannon (facebook: Steve Shannon Photography http://www.facebook.com/group.php?gid=8214637404&ref=ts ), après 3 ans passés à Whistler a choisit de s'installer au sein des ces montagnes aux formes douces, mais au tempérament sauvage. Son Canon et lui se sont trouvé un job et fournissent les catskiers en images exceptionnelles. La quasi totalité des images de nos deux skieurs-voyageurs lui sont dues. Pour la modique somme de 50 dollars canadiens (tarif dégressif si plus de jours), il vous fera passer de skieur correct à freerider pro pendant quelques centièmes de seconde !







Quand il n'y a pas que le ski dans la vie... 

Après une journée de catskiing et environ 8 runs tracés, il est temps vers 16h de rentrer au bercail. Dans le bus du retour Steve trie ses photos sur son Mac et dès l'arrivée au lodge il propose un slide-show de la journée. C'est sympa et rares sont ceux qui ne repartent pas avec leur CD...

Nos rookies étant particulièrement écolos, ils avaient tablé sur l'usage des transports en commun pour se déplacer aux alentours de Red Mountain et de Rossland. Les voilà donc coincés et réduits au stop pour parcourir les 5km qui séparent la station de Red de la petite ville de Rossland. L'accueil des Canadiens n'est là encore pas pris en défaut et 5mn suffisent généralement pour qu'un local vous propose le ride.

Rossland est une ville de ski-bums. L'avenue centrale (qui n'est autre que la High Way 3B) traverse le village sur toute sa longueur, soit 700m environ. Les locaux se retrouvent généralement au pub « The Flying Steamshovel ». On y déguste d'énormes hamburgers (essayez donc de finir le « Kitchen Burger »...) et on y boit moult pintes de bière pour une somme raisonnable. On y trouve également deux ski-shops, dont les prix sont proches de ceux pratiqués en Suisse. N'espérez donc pas y faire de juteuses affaires d'autant plus que le remboursement des taxes à l'exportation reste très aléatoire au Canada.

Sur Red Mountain proprement dit, il n'y a que très peu de choses, mais le restaurant Gabriella's sert d'excellentes spécialités... italiennes. Si la plupart des magasins et restos acceptent les cartes de crédit, il est bon d'avoir toujours du cash sur soit d'autant plus qu'il n'y a qu'un seul distributeur à Red et qu'il ne fonctionne pas toujours. Il est situé dans le bâtiment abritant la caisse des remontées mécaniques, au premier étage, à gauche, derrière la porte d'entrée du bar/cinéma... Saturax ayant mis une bonne vingtaine de minutes à le trouver, il bon de savoir où il se trouve exactement !

Quand il faut sortir bien équipé.

Le trio Arva/Pelle/Sonde est obligatoire pour au moins deux participants par groupe de douze. Tous en revanche doivent être munis d'Arva, qui sont prétés par Big Red Cats. Inutile donc de s'encombrer de poids supplémentaires dans ses bagages de soutes. En revanche les systèmes complémentaires (Avalung, Airbags) sont les bienvenus. A ce propos, le transport d'un airbag en avion demande quelques déclarations préalables.

Les informations IATA relatives au transport sont téléchargeables ici http://www.iata.org/NR/rdonlyres/74E76FBC-56B1-4333-B700-603D016FCA3E/0/Table23A_2010en.pdf Les formulaires à remplir peuvent quant à eux être téléchargés ici : http://www.iata.org/whatwedo/cargo/dangerous_goods/download.htm

Il faut impérativement retirer la cartouche d'air comprimé de l'airbag et l'emballer à part dans un bagage de soute. Le sac lui-même peut être emporter en cabine.

Sur les lattes...

La forêt pouvant être parfois dense et rarement très ouverte, les skis longs (plus de 180cm) sont un peu lourds et peu agiles sur ce terrain ou la vitesse n'est jamais élevée. Par contre les quantités de poudreuse peuvent être impressionantes, justifiant de la largeur sous le patin. Le fat à cambre inversé est donc le maitre des lieux (en restant dans les 178cm).

Big Red Cats propose des S7 en location mais les Maiden AK et les Obsethed de nos compères ont quand même bien fait l'affaire.

Petit truc en passant, pour 10 dollars vous pouvez acheter dans un ski-shop des leash de 3m de couleur vive. Pratique pour retrouver un ski perdu dans la poudre.

Les guides demandent de ne pas utiliser les dragonnes des bâtons pour deux raisons : Les arbres peuvent bloquer un bâton et éventuellement tordre un poignet dans la foulée, et en cas d'avalanche, il sera plus facile de se débarrasser de ces encombrants objets qui « ancrent » dans la coulée. Des poignées de type « corsaire » seront donc les bienvenues.

Sauf si l'envie vous prend de faire de la rando, le matos (peaux, couteaux) est inutile. Par contre, compte tenu de la météo quasi toujours de type jour-blanc, un écran de masque spécifique au brouillard est vraiment un plus. Un petit spray anti-buée est aussi le bienvenu car l'ambiance est humide et l'on passe de l'extérieur froid à l'intérieur chaud du « cat »... Pas la peine de vous faire un dessin.... vous ne le verriez pas :-)

Les canadien(ne)s...

L'accueil est d'une générosité inconnue ailleurs. Même mieux, cela semble toucher aussi les étrangers venus s'installer ici. N'hésitez pas à engager la conversation au bar, au resto, dans la rue... tout le monde cherchera à vous aider ou à vous renseigner. Seul impératif, parler un anglais suffisamment fluide, seul le Québec étant une province francophone et bien loin de la Colombie Britannique.

C'est le portefeuille plein de cartes de visite et d'adresses email que vous aller revenir de ce coin de paradis. Vous aurez l'occasion de rendre la pareille à vos contacts car nombreux sont les canadiens et américains qui rêvent de skier dans nos Alpes.

Fin janvier se tient à Rossland le Winter Carnival, occasion de toutes sortes de réjouissances en ville et en station. Tous les habitants de Rossland s'y mettent pour que la fête soit belle. Les old-timers, les park-rats, les tenanciers de bistrot, tout le monde se réjouis dans une super ambiance bon-enfant.

Enfin, pour rester en bons termes avec les serveurs et serveuses, n'oubliez que le pourboire est quasi obligatoire et qu'il se monte à 15%. Ailleurs que dans les restos et bars, la règle est plus souple mais reste de mise (Taxis, guides, mais pas dans les magasins).

Le retour... et l'aller.

Aller à Red Mountain n'est pas spécialement direct. Pour des raisons paperassières les compères voulaient éviter les USA. L'idée est bonne, surtout quand on trimballe des cartouches d'air comprimé pour les airbags. C'est donc Air Canada qui fut choisie pour les vols Genève-Francfort, Francfort-Calgary et Calgary-Castlegar (ce dernier aéroport étant situé à 45mn de Red). Toutefois un itinéraire se terminant à Kelowna-BC (quitte à passer par Vancouver) eu été préférable au vu des annulations de vols fréquentes sur Castlegar. Kelowna est à 4h de voiture de Red, une location pour la semaine est donc une option raisonnable (compter 350 dollars pour un véhicule moyen).

Si votre passeport est biométrique, vous pouvez envisager de voler sur Chicago puis Spokane qui se trouve à seulement 2h30 de route de Red...

Enjoy !

A consulter :

Big Red Cats : http://www.bigredcatskiing.com/

Air Canada : http://www.aircanada.com

Météo : http://www.snow-forecast.com/resorts/BigRedCats/6day/mid

Steve Shannon Photographer : http://www.facebook.com/pages/Rossland-BC/Steve-Shannon-Photography/37366631360?ref=ss

Les images :

En haute définition sur http://picasaweb.google.com/michel.croibier/RedMountain?feat=directlink

Et aussi ci-dessous :