TK La Jasserie

ça vaut vraiment le coup de lire...


"C'est au cours de l'hiver 1933-34 que les Péageois virent un jour, avec une surprise bien compréhensible, de jeunes farfelus descendre les pentes du Pré Melot, sous l'église de Roussillon, avec de longues et minces planches recourbées aux pieds et des espèces de cannes à chaque main.

La pratique du ski faisait son apparition dans notre vallée du Rhône et ces précurseurs Péageois, qui ne manquaient pas d'audace, étaient : Mimi Lattard, Marius Grenier, J.Benatru, J.Grumbach (frère de notre toubib et conseiller municipal); il y avait même une intrépide jeune fille : Lulu Chiona.

Empruntant le camion Benatru, ou à défaut, celui de la maison Marchisio, ces novateurs regroupèrent bientôt quelques adeptes pour aller sillonner les pentes du Pilat et même de Chartreuse.
Et ils fondèrent bientôt "l'Amical Ski Club Péageois" avec les Thivollet, Formento, Calvat, A.Blanc, R.Lamotte, R.Palayer, etc...

Mais à la même époque la filature Rhodia-Céta (le C remplace le S en 1933, soit dit en passant) avait vu débarquer deux sportifs dont la 5 CV Peugeot fit parfois sensation, et qui n'étaient pas des novices en matière de ski. L'un deux, J.Steinbach, s'était déjà distingué dans les compétitions du Comité des Vosges.

Avec son ami Vollat et ses collègues de Vaise, Grand et Penche, ces skieurs réalisèrent des prouesses sportives qui les firent vite connaître des autres amateurs de sports d'hiver.

Aidés de quelques ingénieurs et employés de Rhône-Poulenc, ces pionniers réunis obtinrent en 1936 le feu vert pour la constitution d'une section ski au Rhodia club. C'est M.Dumollard qui en fut le premier président, Chapuisat le secrétaire et MM.Steinbach, Taillandier et Renouprez les conseillers techniques.

Derrière le champion Steinbach qui brillait dans le fameux "combiné quatre épreuves" (fond, saut, descente, slalom) et en dépit d'un matériel très simplifié (étrier, lanières et ressorts talonnier) les progrès permirent aux Charrin, Isler, Gruffat, Serres, Gruet, Menat, Dubois, Bertrand et autres bourgeois de parcourir les pentes du Vercors, de Chartreuse ou du col de La Morte où ils pouvaient bientôt utiliser les premiers remonte-pentes du Dauphiné.
Car savez-vous où a été installé le premier téléski au monde ?
Au Pilat, oui, à la Jasserie du Mont Pilat plus exactement.
Le premier qui aurait pu faire breveter cette invention, appelée à un incroyable avenir, est Jean Masson, le patron de la ferme restaurant de la Jasserie que beaucoup d'entre vous connaissent sans doute.

L'ingénieux frère de l'international Dudu Masson construisit ce prototype avec les moyens du bord, n'achetant que le câble qui reliait les 2 poulies horizontales tournant sur 2 pylônes en béton. Et ces pylônes existent toujours ; celui du haut du Pré de Panisset est visible de la route qui arrive de la Jasserie.

Avec son moteur à essence, ce téléski fut mis en route en 1933 et nos pionniers du ski se souviennent très bien s'être accrochés à son câble afin de slalomer sans fatigue sur ces pentes de Panisset.

Quant à nos "fous du volant" Steinbach, Gand et Dumollard, ils arrivaient à s'entraîner en semaine en se rendant, entre 11 et 13 heures au Bessat ou au Grand Bois. Et notre futur président général Steinbach, partait le samedi matin pour disputer l'après-midi à Chamonix les championnats de France de fond, puis le lendemain ceux de saut, descente et slalom avec retour le dimanche soir à Roussillon !!! La vitesse n'était pas encore limitée il est vrai !

Le premier concours de ski du Rhodia Club fut organisé en 1938 à la Ruchère (chartreuse) et honoré de la présence du directeur Ledrut qui fut président général quelques années plus tard.

De leur côté les Péageois de l'A.S.C.P. étaient devenus des sociétaires de l'U.S. Péageoise avec M.Grenier (René comme président, cela en 1937. Et les jeunes adeptes vinrent se joindre aux premiers virtuoses de la spatule : les R.Berthet, Servian, G.Satre-Maitre, H.Roux, Joly, Geoffrey, Sulpice, ainsi que Mlles G.Lafond, H.Montez, L.Chiona, O.Rey, G.Mallen, C.Bouchet et autres intrépides du Pilat qu'ils atteignaient le samedi à la nuit, mi en vélo, mi à pied, avant de coucher dans la fameuse grange Masson où le thermomètre descendait très au dessous de zéro ! Il fallait avoir la santé et le moral et, pour les jeunes filles, le mépris du "qu'en-dira-t-on".

En janvier 1939 les skieurs du Rhodia Club rassemblent 30 personnes pour leurs 3 sorties : Pilat, Villard et Chartreuse ; et ils programment ensuite : Huez, Plateau de Beurre (col du Rousset), La Morte et le Revard. Sans parler des entraînements au "Grand Shuss" du Pré menu, à Roussillon, à chaque chute de neige...

Et la saison se prolonge pour certains "mordus" par du ski de printemps (et oui, déjà !) à la Cote 2.000 de Villard au refuge Chancel et au col de Laurichard (près du Lautaret).

Mais avec le manque de subvention et les restrictions de carburant, l'emploi des cars Richard, de Sonnay, devint un luxe ; alors que certains voyages en train (y compris trains de marchandises !) se transformaient parfois en expéditions plus éprouvantes que la journée de ski elle-même.

comme d'autres activités sportives, le ski devra attendre l'après-guerre pour retrouver un nouveau souffle et réaliser une nouvelle fusion."


source http://www.rhodiaclub.com

Pierre Olivier