Je suis parti avec Jérôme la semaine dernière, avion pour Nice puis bagnole pour la Bulgarie. Mais cet idiot de Jérôme avait oublié les papiers de sa bagnole, du coup les douaniers Croates, un peu tatillons, nous ont refoulés à la frontière slovéno-croate. Du coup un peu frustré, on a fait un gros brainstorming pour savoir ce qu'on pouvait faire. La première solution était de louer une bagnole et de continuer, la seconde était les Tatras avec comme correspondant local Viktor. La première solution a vite été abandonnée car avec les voitures de location Slovènes on ne peut pas aller à l'étranger. J'ai alors appelé Viktor pour savoir comment étaient les conditions d'enneigement dans les Tatras. Lui de son côté a appelé d'autres copains à Liptovski Mikulas. Au bilan, il faisait chaud mais y'avait encore plein de neige même jusqu'en bas (1000m). Donc direction Bratislava pour la nuit. Au final, on aura perdu que 3 heures, ce qui n'est pas beaucoup. Arrivé là-bas, on s'est acheté des cartes des Tatras et on a fait une grosse soirée comme à l'accoutumée avec Viktor (bars, puis soirée chez des gens). L'estomac de Jérôme n'a pas supporté et quant à moi je n?étais pas en grande forme le lendemain. On pris la route direction de Liptovski Mikulas pour dormir dans la baraque où on avait été y'a 2 ans avec Nils et Raf. Rassurés on voit que les montagnes étaient bien blanches mais on sais pas encore où c'est bien pour la rando et si y'a la possibilité de faire un raid de quelques jours. On fait des recherches sur Internet où on trouve un itinéraire côté Polonais de Tatras avec changement de vallée et de refuge tous les jours. Par contre la météo n'est pas vraiment optimiste puisqu'elle annonce de la pluie puis de la neige. Donc changement de pays encore une fois et avec toujours la trouille de se faire refouler à la frontière mais ça passe, puis départ pour le premier refuge sous la pluie.

Arrivée au refuge de l'Ornak, super refuge immense en rondins colmatés à la paille. On pourrait d'ailleurs assimiler les refuges à des hôtels, ils sont ouverts toute l'année, ils sont chauffés et ont même de la bière à la pression. L'après midi le temps s'améliore et on part se faire l'Ornak sommet rond à 1800 m d'altitude. J?ai vraiment pas la pèche contrairement à Jérôme qui gambade devant. En haut la neige est couverte d'une petite couche de poudre sur un fond dur, c'est excellent et en bas c'est pourri. On se fait une bonne descente dans un gros couloir d'avalanche pas très raide au milieu de la forêt d'épicéa. Le soir bonne bouffe : soupe à la choucroute saucisses etc... Les bons trucs pour mettre en route les rétropropulseurs.

Le lendemain, il neigeote, on redescend une partie de la vallée à ski. Et on attaque une longue montée sur une croupe. Au début on est dans des gros épicéas, après on passe dans des peuplements de pins couchés (?) et après on voit plus rien car on est dans le brouillard. Heureusement, il y a des piquets en bois tout les 100 m pour nous montrer qu?on n?est pas perdu. On arrive enfin au sommet du Cemniak et sa borne frontière en béton. On attend là une heure une fesse en Slovaquie et une fesse en Pologne pour voir si ça dégage, car on a un parcours sur les crêtes à faire pas vraiment évident par ce temps. Au bout d'un moment on voit toujours rien et on n?a pas envie de revenir au refuge alors on se lance avec boussole et carte. Heureusement la crête est arrondie et on voit que c'est toujours balisé avec des piquets en bois et qu'il y a régulièrement des bornes frontières. On a 4 petits sommets à passer avant de redescendre côté polonais. Miraculeusement, le temps se dégage sur le 3ème et on découvre enfin le paysage qu'on n?a pas encore vu : de bonne faces rocheuses surenneigées et avec des couloirs un peu partout qui donnent envie. Sous ce sommet, on va voit une grande pente côté Slovaquie qui nous tend les bras, on y va et c'est un régal. On remonte sur le dernier sommet pour redescendre sur une pente relativement raide, bordée de rochers, là aussi c'est trop bon. On arrive enfin au refuge Kondratowa, plus petit que l'autre mais sympa. Le gardien est un peu grippe sous mais les raviolis à la russe sont excellents.

Lorsqu'on se lève le lendemain matin, il neige à l'horizontale, tout les projets de couloirs crêtes etc... qu'on a fait la veille tombent à l'eau et on va bêtement prendre l'itinéraire normal : suivre une piste de ski jusqu'au sommet de la station de ski de Kuznice (Zakopane). Arrivé au sommet du téléphérique c'est le déluge : il y a des rafales de vent effroyables qui nous bousculent et on ne voit rien. On se réfugie dans la cafétaria du sommet, où on bois du thé/chocolat bien chaud avec des pâtisseries locales. Au bout d'un moment, on se fait virer de la cafét', parce qu'ils ont décidé de fermé la station de skis. Alors on continue notre route dans la tourmente. Heureusement, sur la suite du trajet, il y a un autre refuge où on fait une pause déjeuner en attendant de voir si le temps s'améliore. Je bouffe une soupe à choucroute énorme qui me retourne le bide... En début d'après-midi le temps se dégage quelque peu même si le vent est toujours fort. On décide de continuer et de tenter le passage du couloir Zratowa turnla. C'est un joli couloir de 150 m de dénivelés à 30 ou 35° avec des falaises de chaque côté. Le début se fait à ski et la fin ski sur le sac. En arrivant en haut, et après avoir eu une bonne chiasse (merci la choucroute), on ne voit rien de l'autre côté, il y a des rafales de vent monstrueuses. On hésite encore une fois, puis on a la chance d'avoir une petite éclaircie dans le brouillard qui nous permet de voir que l'autre côté n'est pas raide du tout. On chausse les skis et on se jette. 

On passe près de lacs gelés pour arriver au plus vieux refuge des Tatras le Pieçu Polski. C?est un immense refuge à 1600m d?altitude au bord d?un lac, c?est la meilleure zone de ski de rando des Tatras polonais. Le soir le menu n?est pas très varié (encore de la soupe à la choucroute et saucisse au pain) et le gardien est peu loquace. On demande la météo à des randonneurs polonais : demain pas terrible avec amélioration après demain. Comme pour finir notre tour on doit passer un petit couloir qui nécessite de la visibilité, on se dit que s?il fait mauvais demain, qu?on devrait plutôt aller faire du tourisme à Cracovie.

Le matin en se levant il y a un brouillard à couper au couteau et 15 cm de fraîche, mais le polonais nous disent que ça va peut être s?améliorer dans l?après-midi. On décide de laisser tomber le tourisme. Eux, sont accompagnés par un guide qui connaît bien les lieux, on va suivre leurs traces tant qu?il y a du brouillard et l?après-midi si ça se dégage on ira faire une classique du coin. On les suit jusqu?au col Gladka Przelecz avec un petite corniche à escalader. Chose importante à noter la technique du ski de rando n?est pas la même partout : les polonais font leurs conversions ski aval en premier mais vers l?amont (si j?ai bien compris) en tout cas ça à l?air casse gueule !!! Au col qui est aussi la frontière, le ciel se dégage. On en profite pour descendre dans une bonne petite poudreuse de 15 cm jusqu?à la limite des épicéas. On essaie de faire un sommet au dessus de nous mais on est vite rattrapé par le brouillard. Prudents, on retourne au col mais on n?est pas vraiment d?accord sur sa direction. Là encore merci à la carte et à la boussole. On se reperd encore à la descente du col mais on arrive enfin à trouver un lac pas très loin du refuge. En fin d?après-midi le brouillard monte un peu en altitude, on rechausse les peaux pour se faire une pente sympa à proximité du refuge. La descente est dans un beau jour blanc c?est pas grave car il y a 20 cm de poudre. Pour le dîner, on a de la chance le gardien est épaulé par 2 jeunes filles qui enrichissent le menu : soupe à la tomate et roti de porc salade et purée. On est content. On va se coucher pour une fois pas tout seuls dans notre piaule comme ça s?est fait depuis le début, là on est 8 français dans une chambre à 8 lits. On prend vite des goûts de luxe avec des refuges comme ça. Je n?arrive pas à dormir à cause du bruit, de la chaleur et surtout du coup de soleil que j?ai pris sur la figure dans le brouillard. J?ai finalement fini ma nuit sur le pallier des escaliers.

Au réveil, « oh bonheur », malgré une bonne tête dans le cul, il fait grand beau et -7. Ça va être parfait pour notre dernière journée. J?arrive tant bien que mal à me préparer. On part enfin vers ce fameux couloir. Une fois qu?on le voit c?est vrai qu?il est joli, pas large (3 m au plus étroit), pas très long et un peu en diagonale sur un versant rocheux, une belle ligne autours des 40°.

On débouche sur une crête rocheuse qui mène à un sommet de la frontière. Moi je suis pas trop à l?aise, comme d?habitude quand il y a du gaz et Jérôme explore de part et d?autre du sommet. Il dégotte un couloir assez long et régulier côté slovaque, il a vite fait de me convaincre de le faire car la descente de l?autre côté du col n?est pas terrible. On chausse sur la crête, par la même occasion une petite plaque à vent de 10 cm d?épaisseur part et purge le couloir. C?est probablement la meilleure descente du séjour. Il y a une bonne accumulation de poudre sur le bord du couloir et il y a peu de risque de grosse coulée. On débouche dans un superbe cirque avec 2 lacs au fond. On n?a pas l?impression d?être dans un massif de 20km sur 40km tellement c?est escarpé. On remonte par un couloir assez large qui ne nécessite pas de déchasser. Dernier col puis dernière descente de couloir de la semaine. C?est encore très bon. On rejoint ensuite le refuge Morskie Oko temple de l?alpinisme Polonais, par des pentes ensoleillées qui commence à s?alourdir et à couler. Il est tant d?aller manger au refuge ou plutôt à l?hôtel, tellement ça y ressemble. On se gave avec une saucisse, des galettes de pomme de terre et une ŻYWIEC (prononcer juviets) la bière locale. Repus on à plus qu?à faire une descente de 13 km sur une route quasi totalement enneigée. On peut aussi faire le trajet en traineau, c?est l?atraction locale. On prend lle bus qui nous mène à Zakopane. On enchaîne sur un autre pour rejoindre la voiture de Jérôme à Kiry.

Le soir on prend une chambre dans l?hôtel du PTTK, le club alpin polonais. C?est une grosse battisse monumentale dans le style bien de l?est. Le mobilier des chambres est lui aussi d?époque, ça à le mérite d?être confortable et pas cher. On se fait un petit soirée à Zakopane, j?ai mal au ventre (suite de la choucroute avariée ?), mais on se prends des piwo et on va dans un resto de viande.

C?est l?heure du retour, on se lève tranquillement on déjeune dans un café et c?est parti pour 16h00 de route non stop. On arrive à Nice à 2h du mat? bien fatigués.

Photos : Jérôme et Remi